Dr testeur

Aéroport Paris-Roissy Charles de Gaulle.

13 mai 2016.

17h00.

- On était pas censés prendre un jet ?

- Si, mais il s'est fait abattre.

Chris Thoriz alluma une cigarette tout en marchant à grands pas vers le guichet d'achat des billets pour Pyongyang pendant que son partenaire d'infortune, Astolpho Dubé, se frottait les mains en le regardant d'un air ahuri. Onze heures de route avaient été nécessaires pour qu'ils atteignent enfin la capitale. Cinq heures de route durant lesquelles il n’eut pour seul et unique compagnon qu’un homme trouvant plus intéressant de parler au volant de ses performances avec la gente féminine au sein de la Loge de Reims, que de regarder la route. Et ce qui devait arriver arriva… pauvre vache.

Faire du stop, il s'agissait d'une assez vieille méthode pour voyager d'un point A à un point B et c'était assez complexe quand vous étiez recouvert de sang et que votre coéquipier ne s'en sortait qu'avec une légère bosse et un air suffisant et pas du tout désolé d'avoir percuté un ruminant à la moitié du trajet.

Six heures de route à bord d'une vieille voiture avec une femme qui parlait davantage de son chat que de la raison pour laquelle ses deux passagers étaient en aussi mauvais état. Il faut dire que son chat était très mignon et qu'elle avait tout de même daigné s'inquiéter de leur état… enfin de l'état d'Astolpho qui avait, semble t-il, un tic nerveux au niveau de la commissure des lèvres.

- Et là il me montra ses toutes petites moustaches et il ronronna en se frottant contre la jambe de Simon. Il faut vraiment que vous passiez à Montpellier Mr Thoriz, vous adoreriez mon chat, j’en suis sûr ! Sûrement un peu moins mon mari, mais qui s'en soucie ?

- Je n'en doute pas Agnès mais nous avons un petit travail urgent à régler et je ne pense pas vous revoir avant un petit moment.

- C'est lié à l'état de votre ami ?

- Quoi, lui ? Non, il a juste fait une petite chute sur le trottoir, vraiment rien de bien folichon, quel maladroit.

- Hoho, mon petit Nestor aussi est un vrai bout-en-train, la dernière fois, il a fait ses griffes sur…

Et ainsi de suite pendant onze heures. Onze. Heures.

Il était assez incroyable qu'en le voyant comme ça au poste de péage, épuisé et couvert de son propre sang, la femme lui montre d'un air résigné la cabine de douche situé
e à sa droite. Et il se trouvait, en une parfaite coïncidence, que des vêtements appartenant au mari d'Agnès étaient dans le coffre de la petite Renaud et faisaient, coïncidence une fois de plus, exactement la même taille que ceux d'Astolpho.

Ainsi, après avoir troqué son manteau rapiécé, son pantalon noir et sa chemise brune pour un jogging de sport rose fluo et une chemise parfaitement repassée, il semblait un tout autre homme. Restait à savoir si c’était en mieux ou non. Vraiment, une coïncidence extraordinairement bienheureuse en ces circonstances.

Donc, après ONZE HEURES de route, les deux compagnons arrivèrent finalement à la capitale où, autre coïncidence, l'endroit où devait les attendre un jet de la Loge, était complètement désert. Et sans daigner lui donner une quelconque explication, Chris s'exclama "C'est cocasse.", avant d'héler un taxi pour se rendre à l'aéroport Paris-CDG.

Un taxi qui, coïncidence bienheureuse une fois de plus, se trouvait appartenir à un membre de la Fondation… la Fondation Notre-Dame bien entendu. Autant dire que le trajet se déroula avec du gospel en fond et un Chris tiquant légèrement de l’œil durant toute la durée de ce voyage… voyage qui dura une bonne heure au vu des bouchons monstrueux que connaissait Paris. Un quelconque forum de la bière ou autre chose avait provoqué un accident. En sachant cela, le chauffeur se mit à réciter des passages de la Bible sur les dangers de la boisson, pendant que Chris récitait quant à lui autre chose pour… se vider la tête :

- Ni les voleurs, ni les cupides, ni les ivrognes, ni les outrageux, …

- 50 grammes de sel, 32 de sucre, trois noix de cajou…

- … ni les ravisseurs, n'hériteront le royaume de Dieu…

- Et c'est le cycliste Bernard Hinault qui remporte la coupe. Et oui Gérard, victoire éclatante de la part de cet ornithorynque sur le circuit aéronaval du Louvre.

- … l'envie, l'ivrognerie, les excès de table, et les choses semblables. Je vous dis d'avance, comme je l'ai déjà dit, que ceux qui commettent de telles choses n'hériteront point le royaume de Dieu.

- Babelfish, table à repasser, désabusoirement…

Autant dire que ce fut un long trajet pour Chris. Et un très agréable voyage pour Astolpho. Alors que celui-ci paya la course, il lâcha sur un petit ton cynique :

- Alléluia !

Ce à quoi Chris répondit quelque chose en rapport avec un pied qui lui faisait encore mal et le Tour de France.

Et les voilà devant un guichetier blasé qui se retenait visiblement de bailler devant cet homme en jogging fushia et cet autre homme qui lui souriait en lui demandant un billet pour la Corée du Nord.

Tandis que Chris paya, Astolpho retint l’information que celui-ci venait de lui transmettre. Il la digéra puis sortit en un classique, mais néanmoins adapté :

- Kékekoi ?

- J’ai dit que le jet de la Loge s’est fait abattre.

- Et… que… par qui ?

- La Fondation pardi. Ils sont aussi sur le coup et ils doivent être déjà partis à l’heure qu’il est.

- Et… c’est pour ça qu’on est là… avec les civils ?

- Tu es un civil aussi, et vois le bon côté des choses, tu seras sur celui du hublot.
-Bordel…

- Tu l’as dit. Maintenant excuse-moi mais il nous reste cinq minutes pour embarquer.

- …

- Le prochain était dans cinq jours tu sais.

Et sans lui laisser le temps de s'expliquer davantage, Astolpho prit sa valise, soit une simple sacoche autour de son cou, et courut à perdre haleine vers le tarmac où une mère de famille essayait de remettre la valise de son petit garçon sur ses roulettes. Il se pourlécha alors les babines, ce que Chris ne manqua pas de remarquer alors qu'ils courraient désormais tous les deux en dépassant la mère qui avait finalement opté pour un vulgaire, mais ironiquement efficace, coup de pied sur ladite valise qui se remit magiquement en place. Des tendances masochistes donc.

- Ça fait combien de temps ?

Le sens de la question était très clair mais Astolpho qui peinait quelque peu à dialoguer, contrôler sa faim et courir vers un avion qui était en train d’allumer ses moteurs, mit quelques secondes à répondre :

- Haaa, sans vouloir t’offenser, ton sang n’est pas forcément le plus intéressant d’un point de vue nutritif. Il faut juste que je trouve un endroit où boire…haa, ma petite bouteille.

- Comment oses-tu ? Mon sang est parfaitement délicieux, tu ne t’y connais vraisemblablement pas l’hémovore. Et… tu n’avais pas cette bouteille en sortant de chez moi.

- … Comment tu le sais ?

- …

- Putain tu… Ha, tu te sens obligé de fouiller dans les affaires des autres ?

- Seulement quand je… ouais en fait oui, tout le temps.

- Haaaa, c’est la vache.

- MarGarett ? Je pensais l’avoir écrasé.

- Oui ben faut pas gâcher le sang.

- …

- …

- Urgh.

Et sur ces paroles pleines de bon sens, les deux membres de SAPHIR se dirigèrent vers la porte qui se referma derrière eux dans un grand bruit. Puis, tandis que Chris, pas épuisé le moins du monde, montra leur billets à un contrôleur quelque peu surpris, Astolpho se dirigea vers les toilettes où il fit sa petite affaire, en s'assurant de bien nettoyer après.

Puis il sortit, laissant la place au contrôleur qui regarda attentivement, cherchant une quelconque bombe, avant de lui montrer du bout du doigt son compagnon derrière son épaule. Compagnon qui avait pris la place côté hublot avec un grand sourire suffisant. Ce à quoi Astolpho lui répondit en grinçant des dents :

- Tss, c'était moi qui devais y aller.

- Qui mange MarGarett aux toilettes doit me laisser la… j'ai pas d'autres rimes en -ette.

- Malhonnête ?

- Touché Monsieur le prêtre.


Avion à destination de Pyongyang, place F14.

13 mai 2016.

00h15.

- Eh, tu dors l’hémovore ?

Bercé par le doux ronronnement des moteurs de l'avion qui fonctionneraient ainsi pendant encore 10h46, Astolpho Dubé dormait effectivement.

Ne recevant pas de réponse au bout d'une minute, que ce soit de la part des membres du personnel que des autres passagers, Chris Thoriz se résolut à penser qu'effectivement, tout le monde dormait.

- Hmm, faut croire que je suis le seul conscient ici.

Riant doucement, il se leva finalement de son siège pour se diriger vers les toilettes où il comptait effectuer une autre affaire que celle de son compagnon il y a sept heures. Une affaire incluant un téléphone jetable et une petite lettre tachetée de terre qu'il avait ramassé au moment où il se présenta, quelques minutes en avance, à l'endroit où devait se trouver le jet privé qui devait les amener vers la Corée du Nord où il récupérerait les… os de bœufs.

Ouvrant doucement la porte avant de la refermer dans le même mouvement gracieux et lent, il fouilla dans sa poche intérieure pour en sortir le petit téléphone jetable qu'il devrait bientôt changer.

Les portables jetables étaient assez pratiques dans le sens où on pouvait les utiliser aussi bien dans le milieu de la pègre qu'en tant que civil. Bien que ne contenant qu'un nombre relativement faible de numéros, les informations que détenaient les personnes les possédant valaient leur pesant d'or. Et si Chris pouvait en prendre une part, ne serait-ce que minime, alors il ne cracherait pas dessus.

Vérifiant une nouvelle fois que personne n'avait une oreille qui penchait du mauvais côté, Chris appuya sur la touche "appeler" de son petit téléphone à clapet. Il tomba immédiatement sur la personne qu'il recherchait. Enfin non pas exactement la bonne, juste un subalterne :

- Bonjour, ici The Holy's Pizza, que puis-je faire pour vous ?

- Bonjour, ce serait pour commander une Jesus's pizza, vous la vendez encore ?

- Bien sûr, ce sera sous quel nom ?

- Mr Stefen Klings.

L'homme au bout du fil trembla imperceptiblement à l'annonce de la couverture de celui qui venait lui commander une pizza. Tremblement assez logique quand on a entendu parler… quand on était là pour l'événement qui lui avait valu une jub… peu importe. Il devait faire son travail et passer son collègue à son patron. Chris Thoriz… un partenaire spécial pensa-t-il.

- … je te le passe Chris.

- Merci Mr Folgs. Ce fut encore une fois un plaisir.

Patientant quelques secondes grâce à une petite musique d'ambiance ressemblant à s'y méprendre à une parodie de gospel, Chris sortit doucement la lettre de sa poche, non sans jeter un autre coup d'œil pour vérifier si l'oreille traînait cette fois-ci. Et c'était le cas alors que la voix nasillarde d'Edouardo Grist résonna au bout du fil :

- Ça fait un bail mon garçon.

- Hmm je dirais cinq minutes papa, ça me réussit pas vraiment l'avion.

Cette phrase était un code pour lui signifier qu’il le rappellerait dans cinq minutes…pour des raisons indépendantes de sa volonté.

- Tss, dépêche-toi de me rappeler Chris. Et veille à ce que cette oreille reste où elle devrait être, fais gaffe.

Fermant le clapet de son portable, Chris tira la chasse en même temps qu'il ouvrit la porte, percutant un Astolpho le regardant d'un drôle d'air, mais pas un air de soupçon, juste un air un peu désolé, et coupable.

- Je ne savais pas que ton père t’appelait, je… je vais retourner à ma place.

- Y’a pas de mal. Tu voulais y aller ? dit Chris tout en désignant les toilettes derrière lui.

- Hmm pas vraiment, je te voyais juste pas revenir et comme tu… hmm ne me dis pas tout, je me suis dit que…

Chris lui adressa alors un petit sourire avant de lui donner une petite tape dans le dos.

- On est dans le même camp Astolpho ce qui signifie que si je savais quelque chose, je te le dirais immédiatement. Je voulais juste passer un petit coucou à mon père avant que je ne sois obligé de courir pour ma vie.

- Oui je comprends… je hum, vais retourner à ma place… hum, Chris ?

- Oui ?

- Tu viens de m'appeler par mon prénom, non ?

- Bien sûr que non, qu'est-ce que tu vas t'imaginer encore l'hémovore ?

- Je… hm rien. Passe le bonjour à ton père de ma part.

- Ce sera fait Monsieur le prêtre.

Alors qu'Astolpho lui lança un dernier regard un peu confus et coupable, Chris s'enferma de nouveau dans les toilettes où il composa le même numéro qu'auparavant. Cette fois-ci, ce fut la voix nasillarde de son "père" qui lui répondit :

- Ici The Holy's Pizza, je suis Mr Jean Boomer, que puis-je faire pour vous ?

- Bonjour, je voudrais une…

- Pas la peine de continuer mon garçon, j'ai reconnu ta voix.

- Un agent peut employer un modulateur de voix.

- Mais jamais reproduire cette petite touche de culpabilité dans la tienne. Je ne l'ai connu que deux fois ce ton et jamais personne n'a installé un micro dans la pièce où l'on se trouvait tous les deux mon garçon.

- … Je te hais "papa".

- Ce n'est plus la peine de continuer de m'appeler par ma couverture maintenant mon garçon.

- Je continuerais de t’appeler "papa" tant que tu continueras de m’appeler "mon garçon".

- Hmpf, l'oreille est retournée à sa place ?

- Oui. Je dois continuer à jouer la comédie encore longtemps ?

- Tu sais que c'est assez ironique comme situation. Le fait que tu dises que c'est toi qui joue la com…

- Je sais mais ce n'est ni l'endroit, ni le moment pour parler de cette affaire. Maintenant dis-moi ce que signifie cette lettre.

- Connais-tu le base64 ?

- Euh oui, c'est un espèce de codage informatique. Très basique, n'importe qui possédant une connexion internet peut le déchiffrer. Je l’ai deviné en lisant ta lettre. Et je suis pas super calé en informatique alors c’est vraiment une idée de merde de vouloir la coder avec…

- Mais il est complexe de comprendre le véritable sens de ce que je vais te dire alors quand tu auras une connexion stable, je te suggère de convertir la lettre en base64 et de lire la première ligne verticalement. Tu sauras comment agir à ce moment.

- … Tu peux pas genre, me le dire maintenant ?

- Non.

- Et pourquoi ?

- Parce que tu ne pourras pas le faire si je te le dis maintenant.

- J'ai fait des choses que tu n'ima…

- Oh je le sais bien mon garçon, je le sais bien. Mais je ne te parle pas de ta capacité émotionnelle, je te parle de ta capacité technique. Tu ne peux tout simplement pas le faire maintenant sans faire capoter toute la recherche des os.

- Alors dis-le moi pour que je sache quel est le bon moment pour… faire ce que je dois faire.

- C'est extrêmement dangereux mon garçon. Et là je te parle en termes psychologiques, tu ne pourras pas, comme je te connais, faire ce qu'il faut faire. Il faudra que tu agisses dans l'instant, sans que ton cerveau ne travaille et ne retourne cette phrase dans tous les sens.

- Tu sais que, dès que j'en aurais l'occasion, je traduirais cette foutue phrase Edouardo. Tu sais que…

- Non, je ne le sais pas et toi non plus. Dis-toi que la vie de la personne sur la première ligne est en jeu dans cette affaire.

- Quoi, Astolpho ? En quoi ça le concerne ?

- T'a-t-il déjà raconté comment il a été transformé en hémovore ?

- Oui, il…

- Alors oublie ce qu'il t'a dit, tu n'imagines pas la vérité ni la raison pour laquelle il cache son étoile de SAPHIR dans sa chaussure.

- … En quoi c'est important et en quoi ça a son rôle dans cette affaire ?

- C'est une pierre Chris. Une pierre compose cette étoile. Et cette étoile a des bords aiguisés, or, jusqu'à preuve du contraire, personne ne veut avoir un objet tranchant dans sa chaussure.

- … Je… c'est si important que ça ?

- Si tu faisais plus attention aux petites habitudes et réactions des personnes qui t'entourent, tu remarquerais beaucoup de choses. Et la phrase que tu liras confirmeras cela.

- Donc si je comprends bien, Astolpho sera en danger de mort si je traduis cette phrase avant l'heure ?

- Oui. Maintenant je vais devoir te laisser Chris.

- Quoi ? Mais comment je saurais quand traduire cette phrase et que faire une fois en Corée ? Je sais juste qu'il faut que je récupère le petit tas d'os qui viendrait de Gjallarhorn ! Rien d'autre ! Je ne sais pas où aller, je ne sais pas quand y aller, je ne sais pas comment je vais les reconnaître, je ne sais même pas qui est déjà sur le coup à part la Fonda et je ne sais même pas pourquoi SAPHIR s'amuse à me faire résoudre des putains d'énigmes ! Tout serait plus simple si tu me disais comment faire Edouardo ! Comment tu veux que je m'y prenne ?

- En faisant la même chose que ce qui t'a permis d'avoir cette jubile Chris. Je te laisse.

Alors que la tonalité se fit entendre au bout du fil, Chris regarda à travers le hublot où des petites gouttes de pluie venaient marteler la vitre en rythme. Et il soupira en pensant à ce pour quoi il était le plus doué :

- J'emmerde l'improvisation.


평양 공항 출구 앞.

2016 년 5 월 14 일.

11시

- 북한에 오신 것을 환영합니다 !

- Quoi ?

- Je disais "Bienvenue en Corée du Nord !". Si tu ne sais même pas dire la base quand tu vas dans un pays, tu vas vite être largué l’hémovore !

- Hmpf. Bon, on fait quoi maintenant ?

- … J’ai un petit creux et quelques won dans ma poche, on va manger un truc ?

- Euh ok, tant qu’on ne perd pas de vue ce pour quoi on est là. T’avais pas dit qu’on devait se grouiller ou un truc comme ça ?

- Un membre de la Loge nous attendra au restaurant normalement.

- Oww, dans ce cas oui, pourquoi pas ?

Et sur ces mots, les deux membres de SAPHIR se dirigèrent vers la petite avenue en face de l'aéroport où une magnifique statue de Kim Jong-un levait fièrement son bras à leur approche. En-dessous de celle-ci se trouvait quelques touristes en quête de sensations fortes ainsi que des gardes armés les surveillant attentivement. À l'approche des deux hommes, ils levèrent légèrement leur arme, zieutant la chemise et le jogging fushia d'Astolpho en murmurant dans un souffle “서부 패션”, ce qu'Astolpho ne comprit absolument pas.

- Il a dit quoi ?

- Il a dit qu'il adorait ton jogging et qu'il voudrait le même pour son dictateur.

- ALORS LÀ CHRIS, TU…

- Bon, tu as une petite idée des moyens de transport en Corée ? Je sais appeler un taxi, dire que tu vas payer et dire au revoir, mais à part ça, je ne sais même pas s'il y a des taxis en Corée du Nord.

- Ben oui j'imagine. Par contre tu sais combien va nous coûter une course ?

- Bah, je vais demander au chauffeur.

- Et tu vas le comprendre ?

- … Écoute j'ai passé deux heures à voir ce que je pouvais dire en coréen dans ce foutu avion, alors non je ne saurais pas.

- … Attends, tu as juste appris à dire les phrases-clés mais tu ne sais même pas comprendre la réponse des autres ? Je reconnais ton côté narcissique là-dedans.

- Wowo, tu baisses d'un ton le prêtre ! Je fais très attention aux petits gestes des autres moi alors ferme ta putain de gueule !

Rouge d’avoir crié, Chris prit conscience de ce qu’il avait dit et se calma un peu.

- Hmm désolé. Je suis un peu à cran depuis hier.

- … C'est en rapport avec ton père ?

- Quoi ? Ah oui… non pas vraiment. C'est juste que… je sais pas, tu trouves vraiment que je fais pas gaffe aux autres ?

- Je sais dire “Je suis magnifique” en coréen ?

-Bien sûr, on dit “나는 아름답다.”

- Alors oui, tu es un peu égocentrique sur les bords.

- … T'apprends à tendre des pièges maintenant ?

- J'apprends vite dans ce domaine depuis quelques jours.

- Tss, bon ben je vais opter pour ce petit restaurant là-bas, il m'a l'air pas mal.

- Un restaurant ? T'as déjà vu des gens avec des micros dans un restaurant toi ?

- En France non, en Corée oui.

- T'es déjà allé en Corée ?

- Bien sû…

- Attends quand ? Je me disais aussi que tu n'as pas pu avoir un tel accent en deux heures espèce de menteur ! Quand t'as appris ça ?

- … Avec mon père.

- Attends deux secondes… t'as déjà passé des vacances en Corée du Nord ?

- Pas exactement des vacances… mais ouais, bref on y va ?

Et sans lui laisser le temps de dire autre chose, Astolpho vit Chris se diriger à grands pas vers le restaurant-karaoké. Ce qu’il ne vit pas en revanche, ce fut que celui-ci tournait dans ses doigts une petite décoration autour de son cou. Une petite décoration en forme de larme.


The Diplomatic Restaurant - "The New Diplo".

14 mai 2016.

11h15.

- Bon, tu veux commander quoi ?

Malgré les bonnes intentions de Chris et l'ambiance détendue du restaurant qui tournait une chanson de Pharrell Williams , Astolpho peinait à se sentir à l'aise. Cela devait sûrement être dû au fait que, depuis l'avion, Chris semblait bizarre, moins renfermé sur lui-même qu'avant, lui montrant un peu plus de choses, mais étant tout de même en train de jouer la comédie sur ses sentiments, dans le sens où il pouvait passer de son air arrogant habituel, à une tout autre version, plus sombre et tourmentée.

- Eh oh, tu m’écoutes l’hémovore ?

Et cette habitude également de l'appeler une fois par son surnom et une autre fois par son nom. C’était assez perturbant et briser la glace se révélait un peu dur quand celui derrière celle-ci n’existait pas. Quand celui derrière la glace n’était en fait que le reflet d’une personne se trouvant derrière soi.

- Hmm, ça va ?

Et voilà qu'il s'inquiétait de son état maintenant, alors que ce devait sans doute être lui qui allait le plus mal. Honnêtement, il ne savait que penser de Chris Throriz. Une fois il se montrait étonnamment serein et détendu, et par extension le dernier des connards ; et une autre fois, il se montrait abattu, comme ressassant le passé, un passé autour de SAPHIR et de son père.

- Chris, tu veux qu’on par…

Et avant qu’il n’ait pu terminer sa phrase, un homme s’assit finalement entre eux, les toisant chacun leur tour d’un air détaché.

- Comment ça va les mecs ?

Chris ouvrit de grands yeux devant cet homme visiblement français dans ce bar karaoké coréen.

- Qu'est-ce que…

- Oww, tu t'attendais pas à me voir toi ! Étonnant, Eduardo avait parié que tu serais là. Je suis votre guide en Corée les gars, j'appartiens à notre bonne vieille Loge de Dunkerque.

Au même moment, Chris et Astolpho s’exclamèrent dans une parfaite synchronisation :

- Oh, c’était dans ce restaurant qu’on devait le rencontrer ?

- J’emmerde l’improvisation.


Dans le coffre d’une petite voiture.

14 mai 2016.

11h35.

- Hmmhmhmhmhm !

Tout en enlevant délicatement le bâillon qui recouvrait actuellement la bouche de Chris Thoriz, Gamon Salpetier le questionna sur la nature de ce cri :

- Je te demande pardon ?

- J’ai dit : "c’est vraiment nécessaire de serrer autant ?"

- Oww, et bien oui, il faut que ça paraisse crédible.

- Bien entendu. Et c’est pour ça que tu as foutu un gros coup de poing dans la tête d’Astolpho avant de le bâillonner et de le foutre avec moi dans le coffre de ta voiture…

- Voui, t’as bien saisi le concept, brave garçon.

- Sérieusement, je pense pas que ce soit un bon plan !

- … Tu te rends compte que c’est le tien ?

- Ouais, mais je le sens pas. C’est comme si… c’était trop simple, que la mission se déroulerait sans accroc, sans explosions, sans trucs bizarres.

- Hein ? Ben ça te change de d’habitude alors. Mais après avoir fait un petit vol en Corée du Nord, avoir fait un accident de voiture et te trimballer avec un gars fringué pour le carnaval, je pense que tu as eu ta dose de choses bizarres non ?

- Non, c’est encore trop soft pour le moment. Et tu nous emmènes où comme ça ?

- Ben mec, au QG où se trouve les os pardi, c’était ton plan non ?

- Nan, mon plan c’était "Vu que tu as réussi à voler une voiture de la Fonda et l’identité d’un des gardes avant de le droguer et de le jeter sur la place publique nu, ça te dirait pas d’utiliser sa voiture pour aller aux coordonnées où il y a écrit "SCP-326-FR : les os du cor d'Heimdall" ? Ça serait un bon plan, non ?". Et résultat, tu nous bâillonnes avant d’assommer mon collègue sans même savoir si le plan va marcher et comment on va foutrement faire pour sortir d’un QG de la Fondation avec une Singularité. Donc non, c’était pas vraiment mon plan de base MEC.

- Ben on va improviser, t’es bon dans ce petit jeu non ?

- J’emmerde l’impHmhmhm

Et sans qu'il n'ait pu terminer sa phrase, Gamon le bâillonna une nouvelle fois, sans oublier de serrer bien comme il faut. Puis il referma le coffre en prenant bien garde de n'écraser aucun doigt, avant d'entrer dans la petite voiture où il déclencha l'application GPS pour l'amener vers ce curieux port désaffecté au beau milieu de la baie de Nampo située à une bonne petite heure de leur position actuelle.

Le trajet se passa calmement, non sans quelques bruits provenant du coffre à chaque dos d’âne, mais ça ne devait sûrement être rien. Non vraiment, un trajet tout ce qu’il y a de plus calme et tranquille. Une petite musique d’ambiance à base de percussions veillait même à rendre leur trajet le plus agréable possible Une petite salve de balles sur la gauche, une autre à droite, même un petit feu d’artifice grâce à une gentille petite grenade venait rendre le couplet final à une chanson un peu répétitive au bout de cinq minutes.

N’importe quel observateur extérieur aurait conclu que c’était la voiture des membres de SAPHIR qui était visée, mais non, ce n’était pas la voiture.

Chris, qui était parvenu à la moitié du chemin à enlever son bâillon, tandis qu’une nouvelle salve atteignit cette fois-ci la portière gauche qui était, coïncidence bienheureuse, blindée, dit dans un cri qui parvient à peine à être entendu :

- PUTAIN, MAIS QUELQU’UN CANARDE LA VOITURE !

Et c’était vraisemblablement faux. En effet, on ne tirait pas sur la voiture, on tirait sur les passagers de celle-ci soit une nette différence qui méritait d’être prise en compte.

- C’EST QUI ?

Cette fois, ce fut Astolpho qui s’interrogea sur leur agresseur. Et tout en regardant le rétroviseur pour connaître leur identité, Gamon cria, non sans une once d’ironie :

- EH LES GARS, C’EST SUPER, NOTRE COUVERTURE MARCHE ULTRA BIEN ! L’INSURRECTION NOUS PREND POUR LA FONDATION ! C’EST GRAVE COOL !

Ce à quoi Chris et Astolpho crièrent dans une parfaite synchronisation :

- VA TE FAIRE FOUTRE !

- VA TE FAIRE FOUTRE !


Dans le cerveau de Bertrand.

14 mai 2016.

12h10.

Bertrand était une alouette des champs coréenne. Un oiseau tout ce qu'il y avait de plus classique en cette période de l'année. Ce qui l’était un peu moins, ce fut la scène à laquelle assista Bertrand.

Après avoir vu et participé à une guerre occulte et avoir vu cinq fois le clone de Kim Jong-Un, il pensait finir sa vie sur une note positive en allant à son rencard avec la charmante alouette qui l'attendait dans son nid, sûrement dans une posture aguicheuse.

Roucoulant de plaisir à l'idée de voir la suite de la scène, il fut un peu surpris en voyant cette course poursuite entre deux membres du monde de l'anormal. Ce à quoi Bertrand répondit dans un ton un peu dépressif :

- glglglgoglgoblgo

Signifiant littéralement "-Oh non, pas encore." dans un patois alouettois classique. Cela signifiait également dans un anglais alouettois du Sud : "Aim better dude". Mais Bertrand ne parlait pas anglais et ne comptait pas faire un quelconque voyage d'affaire dans les prochaines années, son travail de percussionniste lui convenant tout à fait. C'est dans cette optique qu'il considéra d'un air ahuri le manque de rythme dans les salves de balles qui tapèrent dans un rythme désordonné la portière gauche de la voiture et la route bétonnée.

Survolant la scène en évitant au passage une balle perdue, il se mit dans un angle lui permettant de voir entièrement l'action sans prendre un quelconque risque. Annabelle attendra.

Bertrand vit donc la voiture de devant virer à gauche tandis que celle de derrière accéléra pour se mettre à côté de celle-ci dans un but purement amical à base d'une petite grenade qui explosa au-dessus de la voiture qui s'affaissa légèrement avant d'accélérer en tamponnant au passage la voiture de droite faisant une brusque embardée pour se remettre en place, ce qu'elle réussit en percutant quelque peu Serge, la vache qui aimait vendre de l'herbe aux jeunes oiseaux, une perte peu importante.

La vache mugit en direction de la voiture sans portières désormais, qui continua de poursuivre la voiture noire portant des éclats de balles sur la portière gauche.

Bertrand assistait à une scène peu commune, ce qui le fit accélérer pour ne louper aucune embardée, cela valait mieux que tous les films hollywoodiens qu'il avait volé à des humains. Dans une tentative singulièrement élaborée de vol, quelques autres curieux vinrent le rejoindre pour lui demander ce qu'il se passait. Leur faisant un bref résumé de la situation, ils se mirent tous ensemble à poursuivre les voitures pour assister à la scène, soit une dizaine d'alouettes, cinq moineaux, une bonne cinquantaine de bouscarles, et même Dimitri, un aigle royal quelque peu blasé.

Serge mugit encore pour signaler sa détresse aux autres animaux sur la route, ce à quoi les vaches, moutons et écureuils dans les environs répondirent en une parfaite synchronisation "C'est la vie", avant de poursuivre à leur tour les voitures qui commencèrent à ralentir à l'approche d'un bouchon sur la route.

Ainsi, Bertrand et des centaines d'animaux suivirent les deux voitures pour assister à un spectacle des plus intéressants.


Dans la voiture Fondationna-saphirienne.

14 mai 2016.

12h15.

- MERDE MERDE MERDE !

Astolpho était complètement terrorisé et pour une bonne raison : une balle venait de faire percer l’intérieur du coffre à l’exact emplacement de sa tête quelques secondes auparavant.

- BOUGE TON CUL LE CHTI ! SORS-NOUS DE LÀ PUTAIN !

Chris aussi était à cran, il fallait dire que la situation n’était pas des plus simples lorsqu’il se prenait le pied de son coéquipier paniqué toutes les dix secondes alors que celui-ci remuait, en proie à une panique assez désagréable bien que parfaitement justifiée.

Une nouvelle salve de balles effleura cette fois, non pas la portière, mais le toit de la voiture qui roulait à une vitesse assez élevée, se rapprochant inexorablement du bouchon, de plus en plus proche. Ces balles ne laissèrent que des fines traces de rayures sur le toit, ainsi qu’un bruit semblable à…

- HAHA, J’AI L’IMPRESSION D’ÊTRE CHEZ MOI AVEC CETTE PLUIE ! PLIC PLOC !

Un coup sourd en provenance du capot ainsi qu’une autre salve lui répondirent, tandis que la voiture effectua un dérapage tout ce qu’il y avait de plus incontrôlé, avant de se prendre celle des membres de l’Insurrection en pleine face. Enfin, plutôt en plein capot, heureusement que, coïncidence une fois encore, les voitures étaient blindées des deux côtés et aucune courbature ni crampe ne toucha les personnes à l’intérieur. Bon des hématomes oui, mais qui s’en soucie ?

En revanche, il se trouvait désormais que les deux voitures étaient maintenant toutes les deux à l’arrêt.

N’osant pas faire le moindre geste, Astolpho et Chris restèrent confortablement dans le coffre qui l’était un peu moins, bien que parfaitement aéré de par les nombreux trous le perçant.

- Chris… on est arrivé ?

- …Apparemment. Je vais mal le noter sur Blabla car ce chti, je peux te le jurer !

Au même moment, les membres de l’Insurrection, dont un arborant un hématome au front, se dirigèrent en marchant vers la voiture de la Fondation. Le membre de la loge dunkerquoise ne savait pas vraiment quoi faire sur le coup, il se contenta donc leur sourire stupidement, ce qui déstabilisa quelque peu l’un des agresseurs lorsqu'il sortit son pistolet de sa ceinture.

Visant calmement la tête du dunkerquois, toujours en train de montrer ses dents blanches, il tira une première fois, mais rien d’autre qu’un petit "Toc" quelque peu désagréable fut entendu. Aucune fissure.

Toujours souriant, Gamon tourna sa clé, espérant ainsi pouvoir s’enfuir, mais la voiture n’émit qu’un faible crachotement : elle avait rendu l’âme. Et il espérait que ce ne serait pas son cas également.

Le membre porteur de l’hématome fouillait pendant ce temps-là dans la voiture, et en sortit un petit… un assez gros pistolet mitrailleur. Et Gamon continuait encore et toujours de sourire, ce qui eut l’effet d’énerver de manière drastique les membres de l’Insurrection.

Visant soigneusement, il tira une première salve qui atteignit le conducteur qui put alors apercevoir une grosse fissure à l’emplacement de sa tête, continuant de sourire stupidement alors qu’une autre salve augmenta la taille de la fissure, et que de petits éclats de verre s’effritèrent sur ses genoux.

Alors qu’il arma une troisième fois son pistolet, cette fois-ci en souriant tout à fait, des bruits se firent entendre derrière lui, et son collègue arbora une mine ahurie en localisant l’origine du son de martèlement.

- Eh euh Cremson… c’était prévu ça ?

Se retournant doucement, il regarda patiemment les divers animaux qui le regardèrent à son tour. Une des vache meugla alors que celui-ci la fixait depuis dix bonnes secondes.

Un silence gênant entre les deux hommes et les animaux s’installa, et alors que l’un des oiseaux s’approcha, son collègue sortit de sa torpeur pour armer son pistolet et viser la vache qui continuait à le regarder en mâchouillant de l’herbe.

- Bordel, mais pourquoi elle me mate comme ça ? Pourquoi je braque une vache d’ailleurs ?

Cette question était assez rare mais sa réponse était assez simple : parce qu’il n’avait pas l’habitude de se faire mater par un ruminant autre que son ex-femme. Et lorsque l’Homme ne connaît pas quelque chose, ou que cette chose est assez étrange ou effrayante, il aura toujours tendance à la menacer ou à lui montrer sa supériorité. Et c’est ce que fit Étienne Dyne alors qu’une vache continuait à le regarder, mâchant une nouvelle fois son herbe.

Un lien quasi surnaturel s’effectua entre le ruminant et l’homme armé. Et alors que celle-ci manifesta son impatience comme les dizaines et dizaines d’animaux à ses côtés en approchant d’un pas, un homme provenant du bouchon, s’exclama dans un coréen parfait :

- 김정은의 공.

Expression pouvant se traduire littéralement par : "Par les couilles de King-Jong-Un" soit une expression marquant la surprise… ou une photo de nue du dictateur nord-coréen, ce qui était un peu moins probable.

Ce qui fut plus incroyable encore, ce fut que le membre de l’Insurrection choisit ce moment-là pour se décider à tirer une balle sur le ruminant, qui s’écroula sur le côté.


Dans le cerveau de Bertrand.

14 mai 2016.

12h20.

- Oh putain il a tué Michael !

- Espèce d’enfoiré !

Et ce fut sur un mouvement de colère générale que tous les animaux rassemblés sur cette petite bande d’autoroute se décidèrent à charger en direction du tireur, qui après avoir vidé son chargeur sur Stéphane, le gentil écureuil sans histoires, décida de s’enfuir en direction de la voiture blindé, le tout en verrouillant la portière pendant que son collègue tournait la clé.

Mais la voiture avait calé. Et c’est dans une tentative singulièrement désordonnée de renverser la voiture, qu’une nuée de petits oiseaux se mirent sur le capot pendant que les vaches de la famille de Michaël, en deuils, chargèrent la voiture qui se retourna dans un grand bruit, roulant sur la petite colline à côté de l’autoroute.

Et alors que la grande majorité des animaux poursuivirent les pauvres bougres dans la voiture, Bernard si dit qu’il en avait assez de ces conneries et qu’il déménagerait peut-être en France ou en Angleterre, qui sait ? Et alors qu’il se dit cela, il tourna sa petite tête en direction de l’autre voiture, et zieuta d’un œil étonné l’un des fuyards, murmurant doucement :

- Foutu mode occidentale.


À deux heures du port de Nampo.

14 mai 2016.

4h00 à Paris.

- Chris, ralentis ! Tu vas trop vite !

San se retourner ni même ralentir, Chris Thoriz s’exclama dans un ton qui se voulait vraisemblablement amical :

- T’es taré ou quoi ? L’Insurrection se fait poursuivre par MarGarett et ses srabs les oiseaux, et je suis ok pour la protection animale, mais je pense que ces deux gusses vont s’en sortir après les avoir transformés en steak tartare si tu vois ce que je veux dire.

- J’suis d’accord avec l’autre con, même si je peux t’assurer que c’est pas le meilleur plan que d’être dans une ruelle sombre avec un gros ruminant.

Cette fois-ci les deux hommes s’arrêtèrent pour fixer leur collègue chti.

- …

- …

Oui, juste le fixer d’un air à la fois surpris et légèrement dégouté.

- Ça va les mecs, j'étais désarmé à ce moment-là ! Et j’étais comme paralysé quand elle a…

- Wowowo, stop ! Je veux pas savoir si tu veux te faire les animaux de la ferme version pornographique, alors maintenant on bouge son cul avant que je vous botte le vôtre ! Et on parle plus de cette…

- … Bordel, tu t’es fait violer par une vache ?

- J’ÉTAIS DÉSARMÉ OK !

- J’AI DIT STOP ! Je veux pas savoir comment, où ou pourquoi elle a… et puis merde, comment t’as pu croiser une putain de vache dans une ruelle sombre ?

- Je veux pas en parler… mais disons que j'étais en train de traire ma…

- T’es un agent ? Ou un agriculteur ? Ou un agent agriculteur ?

- Non.

- Mais pourquoi tu… oh et puis merde, arrête de lui poser des questions Monsieur le prêtre, c'est pas très catholique de parler de zoophile.

… Urgh.

Et sur ces mots plein de sagesse, ils coururent vers le port de Nampo où devait se trouver la prochaine étape de leur mission, l’artefact tant désiré : les os du cor d’Heimdall.


Devant le port de Nampo.

14 mai 2016.

13h30.

- PUTAIN ! PUTAIN ! COMMENT ON FAIT MAINTENANT ?!

- MAIS BORDEL, J’EN SAIS RIEN ! C’EST LE CHTI QUI L’A DÉFONCÉ !

- MAIS C’ÉTAIT LE PLAN ! C’EST PAS MA FAUTE SI…

- FERMEZ VOS GUEULES, JE RÉFLÉCHIS À UN AUTRE PLAN !

Réfléchissant à toute vitesse à un autre plan pouvant les sortir de cette situation quelque peu inédite, Chris se dit que, finalement, il n’en existait aucun qui n'eût une issue non létale pour l’un d’entre eux.

Et il fut satisfait de son plan de l’appât incluant le chti est une balle dans la tête. Ainsi que, si le destin était conciliant, une issue de secours qui se matérialiserai subitement au milieu du port.

- Bon… le chti… tu as toujours été le plus détest…

- Wowowo, hors de question que je serve d’appât ! C’était ton plan à la base le coup du “Allez les gars, on tabasse un garde par derrière pour que je me déguise en mode Fondafion SCP, et pendant ce temps-là, l’hémovore et le chti font le plus de bruit possible pour que je puisse récupérer l’artefact. C’est pas un bon plan ?”

- Ouais, mais j’avais pas prévu que le garde que t’as buté avec la clé à molette était un putain de membre de SAPHIR infiltré ! Je parie qu’il devait nous donner des infos ! Et maintenant il est mort bordel !

- Bon, donc je suis ok pour le coup de l’appât Chris.

- Ouais, il est pas d’acco… PUTAIN ASTOLPHO ! ET LA COHÉSION DU STA…

- Ou…

- Ou quoi ? Il n’y a pas d’autre solution l’hémovore, faut but… faut que le Chti serve d’appât.

- Ou alors… ah… on continue.

Arrêtant quelques secondes de ronger son ongle en regardant le cadavre de son collègue, Chris Thoriz jeta un coup d’œil à Astolpho, ce dernier arborant un air de douleur intense dissimulé par un sourire.

- Eh le prêtre, tu…

- Par.. continuer, j’entends… ah bordel, pas encore.

- Qu’est-ce qui t’arrive l’hémovore ? Plus de sang ? Je peux t’en do…

- Non, non et puis ton sang pue le caca, non merci… c’est pas contre toi, mais… ah putain…

- Eh Astolpho, et le mien ?

- Jamais les chat… Rah merde, je vais m’évanouir…

- Hein ?! Pourquoi ?

Fixant le chti d’un air suspect, il s’approcha lentement de Chris pour lui murmurer à l’oreille :

- Tu te souviens de mon… de notre discussion sur mon problème de “vampire gay” ? Comme quoi je pouvais voir à travers ses yeux pendant un moment ?

- Ouais… ouais je vois. Mais quel est le rapp… Ah ! Maintenant ?

- Ouais… c’est… pressant. Hm, faites pas des trucs sur mon corps quand je serais endormie… et partez pas sans moi.

- Non, qu’est-ce que tu…

Sans lui laisser le temps de terminer sa phrase, Astolpho s’évanouit en entraînant Chris dans sa chute. Celui-ci s’effondra sur le sol en poussant un grognement mécontent.

- … Hmm… vous avez besoin d’intimité ? Je savais pas que vous deux, vous…

- Roh ta gueule. Garde-le à l’œil tu veux ? Je vais faire un tour.

- Hein ? Où ça ?

- … Disons que je viens de checker sur mon portable et… il y a un point de wifi dans les environs. Et sachant que j’ai encore croisé personne, je vais…

- Wifi ? Tu veux vraiment chercher un plan sur Internet ? Putain, va sur Castorama acheter un cargo de pelles vu comment on est dans la merde !

- Pas un plan le chti… disons que je vais faire un peu de décodage.


Port B de Nampo.

14 mai 2016.

14h00.

Émergeant lentement de sa léthargie involontaire, Astolpho grogna tout en se tenant la tête douloureusement, regardant autour de lui le décor qui s’étalait sous ses yeux :

Une goutte d’eau lui tomba sur le front tandis que d’autres tombèrent autour de lui. Il avait été déplacé dans un endroit relativement sec par un de ses collègues se tenant à moins d’un mètre de lui.

- Hmpf… je…

- Bien dormi ? Comment tu te sens ?

- Comme l’Université après réduction des crédits, répondit Astolpho, j’ai perdu une partie de mes facultés.

Se relevant lentement pour s’épargner un m l de crâne plus intense, Astolpho regarda autour de lui, et ce qu’il vit le choqua, en plus de le préoccuper.

- Mais… c’est vide… c’est le bon endroit au moins ?

Grignotant des cacahuètes qu’il avait vraisemblablement trouvé quelque part, son possesseur lui répondit :

- Affirmatif. Mais le problème l’hémovore, c’est que la voiture nous a indiqué cet endroit, endroit où est censé se trouver l’artefact, mais il n’y a absolument personne, pas une mouche… Le Chti ?

- Ouais ? Quoi ?

- T’as pas une idée du piège qu’ils vont nous tendre ? Histoire que je me prépare psychologiquement.

- Hein ?!

Se levant subitement du petit rocher sur lequel il était assis, le “Chti” regarda autour de lui, cherchant des yeux un quelconque faisceau rouge qui serait pointé sur son front.

- T… t’en es sûr ? Je veux dire… tu crois vraiment que la Fondation nous a tendu un piège ?

- Je ne crois en rien le chti, je constate. Et là je constate que c’est troublant. J’ai le nez bouché, mais ça pue le traquenard à cent kilomètres.

- … Alors faut partir Chris ! Sérieusement, si t’as un mauvais pressentiment, je veux pas risquer ma peau pour des os !

Lui lançant un regard à la dérobée, Chris se leva et examina pour la cinquantième fois depuis leur arrivée, le décor qui s’étalait devant ses yeux.

Toujours les mêmes portes rouillées.
Toujours les mêmes gouttes s’écrasant sur le sol dans un rythme ternaire, comme des tambours.
Toujours les mêmes visages ahuris cherchant une sortie possible.
Toujours la même port… Non… elle a bougé… non… elle bouge…

- Bordel, couchez-vous !

- Hein ?!

- Y’a quelqu’un qui se ramène ! Grouillez-vous !


Port B de Nampo, quai 113-B.

14 mai 2016.

14h05.

Consultant d’un œil perçant sa montre tout en émettant un claquement de langue insatisfait , l’agent Àlava fit un signe à ses hommes pour quadriller le périmètre, à la recherche d’éventuels snipers ou d’autres membres de l’Insurrection.

Oui, d’autres.

Car ils étaient en retard à cause d’un… imprévu.

Un imprévu qui avait pris la forme d’une altercation entre deux des membres les plus dangereux de l’Insurrection du Chaos, et ses hommes.

Alors qu’on était, moi et mon équipe, en route pour déposer l’artefact au point de transfert, mes intuitions se sont confirmées quant au nombre de personne dans la confidence.

Dix minutes de retard à cause de la Main du Serpent,

Menace éliminée.

Douze minutes de retard à cause d’Oneiroi,

Menace éliminée.

Une heure de retard à cause de l’Insurrection…

Et on s’est fait battre.

Tout s’était passé en à peine une minute, trop rapidement pour que quiconque de moins entraîné que je ne le fut, ne puisse survivre. Survivre à … ça.

Alors que le convoi avançait bien, on est tombé sur Étienne et Cremson Dyne, deux des membres les plus dangereux de L’Insurrection des origines. Des légendes dans le milieu de l’anormal. C’était l’un de mes hommes qui les avait repéré à l’aide de ses jumelles.

Et là où un ennemi sensé aurait tenté de les abattre à distance, de les prendre en embuscade, eux se contentaient d’avancer vers eux en courant,… il ne restait donc qu’un seul cas de figure :

Une attaque frontale, l’arme à la main, et la sueur à la tempe.

Et n’importe quel bon soldat vous le dira : on n’attaque pas un ennemi frontalement si l’on est pas sûr de sa force de frappe…voire que l’on peut se passer de son intelligence si on estime que notre force de frappe est suffisamment élevée pour nous permettre de foncer sans réfléchir aucunement, si c”e n’est au repas que l’on va manger ce midi, et si c’est nos adversaires qui le prépareront.

Une embuscade, j’ai pensé à ça sur le coup.

Deux de mes hommes ont quadrillé le secteur de leur propre chef en quelques secondes, pendant qu’on devait s’occuper de ces deux-là.

Craignant un tir lâche par derrière, j’ai arrêté la voiture au milieu de la route et me suis rendu compte que… putain, il y avait personne.

Mais on était au milieu de nulle part donc il devait forcément être embusqué, ils n’étaient tout de même pas seul !… et bordel ce qu’on était exposé.

J’ai hésité.

Longuement hésité à ordonner la retraite. Et ils étaient de plus en plus proche chaque seconde.

Sur le coup, personne ne s’attendait à cette tactique, et il a fallu cinq secondes… cinq putain de longues secondes pour que mon cerveau prenne conscience de la situation et de ce que ma bouche devait produire comme ça en s’ouvrant, cinq autres pour que le sniper comprenne la signification de ces mots, et une autre pour que son cerveau les interprète et ne se décide à activer ses muscles :

- BEN TIRE !

- … (son sniper)

Un de moins.

Mais il a tout de même fallu dix secondes pour qu’il en élimine qu’un seul, et pendant ce temps, comme au ralenti, ils se rapprochaient de plus en plus, sûrement avec une arme qui allait tous nous… non… attendez…

C’était bien de la peur que je voyais sur leur visage ?

Oui, et… c’était bien un troupeau de vaches derrière eux ?

En six secondes exactement, le sniper fut abattu d’une balle dans la tête, nous laissant nous battre avec nos armes de poing.

Mais une seconde après ce tir, le temps d’ajuster ce dernier, il fut écrasé par une vache vraisemblablement énervé, et elle, ainsi qu’une quantité vraisemblablement infime, se dirigea d’un seul pas… ou plutôt d’une seule patte, vers nous.

Le temps que nos cerveaux assimilent ce que nos yeux percevaient comme une menace et ce que le fond de notre pantalon perçu comme un liquide, le troupeau était déjà sur nous et, tandis qu’une voiture se fit renverser par cinq moutons, un pic-vert et une vache, les autres dont la mienne démarrèrent en trombe, effectuant un virage à 180°, fuyant dans le sens opposé à notre destination.

Six secondes plus tard, après deux expirations saccadées et un coup d’œil sur le rétroviseur, nous fîmes finalement demi-tour en voyant le troupeau d’animaux hétérogènes se disperser dans tous les sens, oubliant la raison de leur poursuite, ou estimant que nous n’en valions finalement pas la peine.

Arrivant en quatre secondes sur les lieux du désastre, nous vîmes finalement quelle voiture fut renversée.

Celle transportant l’artefact.

Et celle transportant deux de mes meilleurs hommes.

Après avoir confirmé personnellement l’identification et la mort de Boomer, et avoir supervisé les premiers soins de Jacob, qui avait le thorax ouvert par la portière, nous lui confirmèrent que son nom sera sur la plaque commémorative du Site Aleph.

Il n’avait pas de famille, juste des collègues et une mission.

Puis Gregory m'appela pour me présenter la situation concernant l’artefact.

Honnêtement, je n’avais pas vraiment le cœur à continuer cette mission, mais il le fallait tout de même, j’étais “préparé” à ce genre d’“incident”.

L’artefact devait être dans le coffre, coffre qui était actuellement dans le même état que la portière qui avait tué Jacob, soit défoncé et recroquevillée sur elle-même.

Mais l’artefact était là.

Instable désormais qu’il n’eut plus de confinement décent, mais bien là.

Sans tarder une seconde de plus, nous le transportâmes dans un autre coffre, tout en tentant tout de même de colmater la fissure sur la boîte des os.

Après une heure de retard et la larme à l’œil, je descendit de ma voiture et me dirigea rapidement vers mes hommes, devant, pour superviser l’entrée au quai.

Une heure de retard, des ennemis bien informés auraient sûrement pensé qu’on avait changé d’emplacement au dernier moment, au moins ce retard aura t-il eu un avantage.

Mais peu importe, je devais protéger mes hommes, je ne veux plus voir mourir quelqu’un aujourd’hui.

Et cette porte qui ne veut pas s’ouvrir…


Port B de Nampo, quai 113-B.

14 mai 2016.

14h05.

- Hein ?!

- Y’a quelqu’un qui se ramène ! Grouillez-vous !

Se jetant prestement sur le sol, les trois collègues d’infortune observèrent les hommes armés, ou plutôt le seul homme armé, qui était en train de pousser la lourde porte en fer du quai.

Ce dernier avança lentement, fit un signe à ce qui semblait être ses hommes derrière lui, et marcha lentement, étudiant d’un œil d’aigle le décor qui s’étalait sous ses yeux.

N’osant prononcer un seul mot, Astolpho ne fit que déglutir en voyant le logo qui s’inscrivait sur une des voitures à l’arrière de la profession : trois flèches noires qui convergeaient dans un rond aux contours tout aussi noirs.

- Tss, je me demande ce qui les a autant retardés. À vue d’œil, on ne dirait pas un piège, juste des gens suspicieux qui se demandent qui a pris leur Ice Tea dans le frigo.

- Je… pense pas que ce soit comparable Chris, et puis regarde-les, ils se dirigent vers nous et il y a aucune cachette dans ce foutu port !

Voyant qu'il ne répondait toujours pas, le regard orienté vers un coin de la pièce, il continua, plus paniqué, haussant un peu le ton.

-Merde merde merde Chris, il s'approche ! On fait quoi ? Ils vont nous trouver à coup sûr et nous torturer ! Je suis pas venu ici pour souff…

Avant qu'il ne puisse terminer son monologue, le ZIRCON lui appliqua un doigt sur la bouche avant de désigner d'un autre l'artefact au centre.

- Mais… mais c'est que moi ou c'te truc au centre palpite ?

- Non tu rêves pas le chti, et au lieu de raconter des conneries Astolpho, essaye de te rendre utile et tire avec moi sur ce machin.

- Ce machin ?

Orientant lui aussi son regard vers le centre, il pâlit en voyant la cible.

- Mais… que…

- Ouais Monsieur le prêtre, c'est bien ce que tu penses. Regarde, ils ont du avoir un problème avec le confinement, là c'est du scotch ou un truc comme ça pour l'empêcher d'imploser.

- Le viser ? Tirer sur une Singularité ? Mais on sait même pas ce qu'il va se passer ! Ça se trouve, on va tous…

Lui jetant un bref coup d’œil, Chris Thoriz commença à viser la boîte au centre, qui palpitait de plus en plus fort, un air déterminé sur le visage.

- Crever ? Imploser ? Bravo le prêtre, c'est rien comparé à ce qu'ils vont nous faire s'ils nous attrape, alors fais pas ta chochotte et sors ton flingue.

- Mais.. mais si ! Bien sûr que ça peut être pire Chris ! Un explosion ou je ne sais quoi ! Après tout, on sait rien de cet artefact, et vu sa garde, il a l'air vachement…

- Oh me parle pas de vaches Atolfo, et tu veux te faire chopper par la Fondafion ou pas ?

- Non le chti… mais…

- Alors pas de mais l'hémovore, tu vises et tu tires. C'est dans tes cordes ou tu préfères que je t'en passe une autour du cou pour en finir plus vite ?

Pâlissant à vue d’œil avant de déglutir violemment, il hocha imperceptiblement la tête avant de répondre, des gouttes de sueur lui collant du front.

- Oh… ok… je vais le faire.

- Alors fais-le, ils s'rapprochent et j'suis le seul à pas avoir d'flingue. Au fait pourquoi vous avez des…

- Tais-toi le chti, et observe. Astolpho ?

- …

- Vas-y !

Sur ces mots, il tira plusieurs balles en direction du centre du port, un pistolet dans chaque main, dont l'un appartenait à l'agent infiltré qu'ils avaient malencontreusement tué. Astolpho fit de même, bien qu'avec un rythme plus soutenu, le stress et le seul pistolet en sa possession limitant sa vitesse.

Les gardes réagirent au quart de tour en se mettant à couvert tout en tirant vers la source du bruit.

L'un d'eux s'arrêta de tirer en voyant que ce n'était pas eux qu'ils visaient… mais…

- ATTENDEZ ! ILS TIRENT SUR…

Et avant qu'il n’ai pu terminer sa phrase, l'artefact implosa sous l'effet de la balle qui le percuta, propulsant les agents de la Fondation aux quatre coins de la pièce. Les membres de SAPHIR situés à l'autre bout ne reçurent qu'une partie de l'onde de choc, suffisante pour les faire tomber au sol.

Un silence irréel, uniquement interrompu par les morceaux de plâtre tombant du plafond, s'installa sur le quai 001. Depuis sa création en 1850, il avait connu beaucoup de fusillades, d'explosions, de trafics, une véritable haine recouvrait ces lieux depuis des temps désormais reculés. Aujourd’hui, elle servait principalement de lieu de transit pour des machines à laver et autres artefact anormaux… et désormais ne subsistait que du plâtre qui, telle une poudreuse, recouvrait les personnes majoritairement décédées ou inconscientes qu'il abritait.

Il restait toujours quatre murs et un plafond, mais ils semblaient tous courbés, comme plié par quelque géant immatériel vouant une haine intense à ce lieu maudit. Et l’artefact toujours au centre, ne s'était pas déplacé d'un millimètres, émettant toujours sa lueur bleutée.

Après plusieurs secondes de pulsations tranquilles, il s'interrompit, produisant de moins en moins de luminosité avant de tomber en cendres. Cendres sur lesquelles un lézard vint s'installer, comme attiré par ce tas anormal. Alors qu'il toucha le reste d'artefact, il s'endormit en se roulant en boule, inconscient de ce à quoi ressemblait la scène qui l'entourait.

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